Nous nous mettons en marche après le petit déjeuner, la neige est
tombée durant la nuit et les sommets on été bien blanchis. Le ciel bleu
est loin d'être omniprésent, mais la température est idéale pour marcher.
Nous démarrons tranquillement, Marie traîne une crève qui lui prend les
sinus depuis deux, trois jours. Mais rapidement elle me dit :"Si tu
veux y amener vas-y!"... Ces bizarreries linguistiques que l'on
retrouve dans toutes nos régions me font rire, et me rappellent mon Tour
de France, je la chambre avec toute ma retenue naturelle mais le message
est passé. 
Nous marquons quelques arrêts ; sur une plage
pour profiter d'un rayon de soleil, pour manger quelques baies que nous
savons comestibles et pour quelques photos, mais cela ne nous empêche pas
de boucler en 4 heures la section annoncée en 7.
Le chemin
alpin n'est pas une généralité, petit flash-back australien, quand ça
monte c'est bien souvent tout droit dans la pente.
Nous passons le camp français, et nous nous arrêtons sur l'italien, gratuit.
Nous
posons la tente, et cuisinons, de la semoule, du lait en poudre et une
soupe déshydratée, nos discussions sur les petits plats de chez nous
semblent bien loin. L'atmosphère est étrange sur le camping, il y a
moins de vêtements en gore tex que pour un festival en Norvège, et plus
de la moitié des tentes portent l'étiquette de magasins de location. Nous
parlons avec des français, c'est leur premier trek, ils marchent en
pantalon de ville, se plaignent du froid, essayent de deviner tout ce
qu'ils vont devoir faire, mon réchaud à fioul nous élève au statut
d'aventuriers... Je ne suis pas sûr de pouvoir leur accorder réellement
du crédit. Mon opinion se précise une heure plus tard, nous les doublons
tranquillement dans une côte avant de nous arrêter pour une nouvelle
dégustation de baies. Nous voyant en manger des poignées entières, la
conversation fut la suivante :
- Ça se mange ça ? (Avec l'accent du sud)
- Pas du tout, mais on s'en fiche de mourir...
- Haha, et c'est bon ?
- Plutôt oui, essaye tu verras bien !
- Heuuu non, moi, les trucs de la nature c'est pas trop mon truc !!!
- ....
Après
leurs départ, nous explosons de rire, finissons nos baies et reprenons
le chemin. Il neige, nous avançons tranquillement dans la forêt, le
décor et super, une fois passé le dernier point touristique nous
relâchons le rythme. On refait la France, l'écologie et on cherche les
traces de pumas dans la neige. Sur le chemin de retour, un bout de glacier
tombe, première fois pour Marie, elle avait l'appareil dans la main et a eu le temps de faire une photo avant de reposer l'appareil et d'apprécier
le grondement.
Le soir nous retrouverons Doug et Jo. Nous
rigolons bruyamment, partageons du maté, et cuisinons ensemble, mais
allons rapidement nous coucher.

Le deuxième jour nous partons relativement tard, mais rattrapons notre retard sur
la première section, le chemin est roulant, je branche l'auto-pilote et
m'évade dans mes pensées, un petit coup d'œil en arrière dans les côtes
me permet de m'assurer que ma compagne de silence et moi avons le même
rythme. Nous brisons ce dernier avec l'apparition du vent, quelques mots
au sujet des sur-sacs et nos échanges repartent de plus belle. Nous
nous arrêtons à Paine Grande pour utiliser les sanitaires et manger une
orange puis nous repartons le vent dans le nez. 
Cette section
est un peu plus difficile, nous traversons les vestiges d'un incendie,
les arbres sont morts, et cette désolation ne semble pas avoir de fin... l'homme une fois de plus a fait une erreur dont la nature pâtit.
Nous
avançons silencieusement, les chaussure de Marie pourtant neuves commencent à s'abîmer. Je connais le problème, Valentin et Xavier l'ayant
déjà connu avec cette marque (Salomon). La réparation de fortune
tentée avant la pluie ne tient pas.
Mais rapidement
l'apparition du glacier nous fait tout oublier. On se goinfre de baies,
et faisons un stock pour faire une compote le soir même, ça sera un
désastre. La descente est raide, Marie fatigue, nous arrivons à la fin
de la section et cuisinons.
La discussion du repas met en
avant qu'il est plus judicieux de s'arrêter ici pour aujourd'hui et de
s'approcher du glacier sans les sacs. Chose que nous ferons avec Jo.

Je
ne peux m'empêcher de faire des rapprochement entre Marie et Valentin,
peut-être leurs origines, leurs chaussures, leurs amours commun pour les
longues nuit ou des traits de caractères plus profond que je garderai pour moi. Valentin me suggérera que c'est que je lui manque... Mais il y
a définitivement quelque chose de plus. La grande différence
cependant et que personne ne comprend nos explications, deux français,
pas en couple, qui voyagent seuls, et séparément, qui ont commencé
d'Ushuaia pour finir en Alaska à des dates différentes, mais qui
travaillent en même temps dans le parc et partagent une tente pour deux
nuits... C'est trop d'information pour une conversation futile le temps
d'un repas. Nous en rigolons, et réfléchissons comment la rendre encore
plus compliquée.
Le dernier jour est un demi-tour, une demi-journée que nous commençons après le déjeuner et que nous ponctuons
d'arrêts pour déguster quelques baies supplémentaires, ou recoudre les
chaussure de Marie après un accrochage avec une pierre. Nous poursuivons
nos conversations, légères ou plus profondes. Je cède mes bâtons à Marie
au pied de la montée qui avait été pénible à descendre la veille, elle
reconnaîtra sur la fin qu'elle est effectivement plus simple à monter qu'à descendre. Le vent nous pousse et nous finissons en rigolant de
tout et de rien. Un bateau et deux bus plus tard nous sommes presque de
retour "à la maison". Dôme sweet dôme comme on dit ici.
On
regarde les photos dans le bus qui nous dépose à quelques mètres du
Casino (lieu où l'on prend nos repas) on y retrouve Doug´ à table. Puis
les autres dans le dôme un peu plus tard. On a l'impression de s'être
quittés il y a si longtemps, alors que nous mangions avec Jo le soir
d'avant !
Demain nous vaquerons chacun à nos occupations, puis je les regarderai partir pour commencer une nouvelle quinzaine.

Merci Marie pour ces trois jours de partage et d'effort.